Pour construire un portrait-robot, l’enquêteur de la police technique s’entretient en privé avec la victime (ou le témoin) et procède avec elle par étapes successives au modelage informatisé des différentes parties du visage de l’agresseur.
Il m’est apparu évident qu’une observation attentive et une précision rigoureuse du vocabulaire de la description sont nécessaires pour reconstruire un visage au plus proche de la réalité. Comme lorsque Bruno Munari décrit avec le vocabulaire du Designer l’orange ou le petit pois* ou quand Léonard de Vinci géométrise le corps, je me suis interrogée sur la manière dont il était possible de décrire le plus objectivement possible l’apparence d’un visage. Je me suis ainsi employée à observer dans le détail puis à retranscrire de façon rigoureuse par des mots, une série de visages d’individus ayant eu affaire à la justice pour divers motifs criminels. La justesse des termes utilisés doit permettre au lecteur de s’en faire une représentation la plus fidèle possible. Pour tester l’efficacité de cet exercice, j’ai confié ces portraits littéraires à l’interprétation graphique de différents illustrateurs. Il m’intéressait d’observer au sein de cette expérience les similitudes et les différences de leurs portraits ainsi que leur degré de ressemblance avec « l’original ». Ce travail m’a permis de dresser une galerie de portraits et de montrer qu’une multitude d’interprétations sont possibles à partir d’un unique témoignage.
*Bruno Munari, Good design, Edizioni Corraini, Mantova, Italy, 1963
Nous tenons à remercier Jean-Paul Oliger, Chef de la division police technique – Direction régionale de la police judiciaire Grand-Est – Strasbourg et Isabelle Hannauer, Agent spécialisé de la police technique et scientifique, qui nous ont fait découvrir leurs métiers, ainsi que les enjeux et les protocoles requis pour la réalisation d’un portrait robot.